18.2.09

La France rancunière et revancharde

Par Baba Mustapha Sayed
Président du Centre de Saguiat al-Hamra et Rio d’Oro pour les études politiques et stratégiques

La France officielle a trouvé, croyait-elle, dans le problème du Sahara Occidental une occasion d’or pour essayer de refaire, d’une part, la carte géopolitique du Maghreb à sa convenance et conformément à ce qu’elle considère être ses intérêts de « grande puissance maghrébine » et régler, d’autre part, ses comptes historiques avec certains pays de la région, particulièrement l’Algérie, trop indépendante et très jalouse de sa souveraineté à son goût.
Faisant fi des plus importants des principes et valeurs qu’elle affirme sous-tendre son action diplomatique et politique sur la scène internationale, le respect des droits de l’homme et celui des peuples à disposer d’eux-mêmes dont elle s’estime dépositaire devant l’Histoire, la France officielle n’a lésiné sur aucun moyen, légal ou illégal, et n’a épargné aucun effort pour aider la dictature marocaine à faire avorter la lutte légitime du peuple sahraoui pour son indépendance.
Dans le souci de faire payer au peuple sahraoui, voisin et ami de l’Algérie, sa déshonorable, honteuse et cuisante défaite dans le pays des Aurès, la France officielle, rancunière et revancharde, a pris, contre toute logique et bon sens, fait et cause pour le Royaume du Maroc dans le conflit du Sahara Occidental. Depuis 1976, date de l’invasion militaire par le Royaume du Maroc de l’ancienne colonie espagnole.
La France officielle, a tout entrepris pour entraver le processus de décolonisation du Sahara Occidental, entretenir et nourrir un climat de tension extrême au Maghreb et empêcher, par la même occasion, ses composantes de bâtir un avenir commun de paix de stabilité et de concorde.
Au lieu de faiblir avec le temps, de devenir plus modéré, dans son expression, après les immenses et précieux acquis obtenus par le peuple sahraoui aussi bien dans le domaine militaire sur le plan politique et diplomatique, voire être revu, après les changements de majorité à la tête de l’État, le soutien apporté par la France officielle à l’entreprise coloniale marocaine est resté constant : « Pour enquiquiner l’Algérie, me disait récemment un officier supérieur de l’armée française, nous n’épargnons aucun effort pour appuyer et soutenir le Maroc » « Et nous, les Sahraouis, dans tout cela, et la légalité internationale ? faisais-je remarquer au bidasse français « La France, me rétorque-le gradé français, ne voit dans la question du Sahara Occidental qu’un simple et banal différend entre l’Algérie et le Maroc. »
Était-ce l’Algérie qui a crée de toutes pièces, la question du Sahara Occidental depuis le début des années soixante, « motivé » et mobilisé depuis lors, toute seule, la communauté internationale qui son écrasante majorité la considère comme un problème de décolonisation contrarié qui ne peut trouver son issue logique et heureuse qu’à travers l’exercice libre par le peuple sahraoui de ses droits imprescriptibles à l’autodétermination et à l’indépendance ?
L’Algérie pourrait-elle faire surgir ex-nihilo tout un peuple qui ne cesse, depuis des lustres, de témoigner par son courage et détermination, à toute épreuve, que ce soit dans les zones occupées ou libérées de la République Arabe Sahraouie Démocratiques, de son esprit de sacrifice et de sa volonté inébranlable de vivre libre et indépendant sur le territoire de ses aïeuls ?
L’Algérie pourrait-elle obliger ou forcer les Sahraouis de vivre, comme ils le font depuis plus de trois décennies, dans les zones arides inhospitalières du désert de Lahmada ou les conditions minimales d’une existence décente sont absentes , si ces derniers n’ont-ils pas estimé que ces endurances et souffrances font partie des contraintes qu’ils ont acceptées volontiers de supporter dans le cadre d’un combat légitime de libération national qu’ils ont décidé de mener jusqu’à son terme, c’est-à-dire l’indépendance totale de leur pays et sa délivrance des griffes du Makhzen usurpateur ?
Il n’y a décidément de pire aveugle que celui qui ne veut rien voir tout comme il n’y a de pire sourd que celui qui ne veut rien entendre !!
Et sur la question du Sahara Occidental, la France ne veut voir ni entendre, malheureusement, que ce que lui dicte sa haine tenace contre l’Algérie et le lobby pro-marocain, qui a montré, depuis plus de trois décennies, une capacité déconcertante d’orienter la politique extérieure française dans le sens souhaité par la monarchie marocaine
Nous avons souhaité et espéré qu’avec le temps et l’élection de Nicolas Sarkozy, un pragmatique qui n’est pas, nous a-t-on dit, un habitué, comme ses prédécesseurs, des Palais royaux. Mais rien n’est venu, entre temps, nous donner l’impression que la France a l’intention de retrouver, sur ce dossier, une certaine neutralité qui pourrait, le cas échéant, lui donner la possibilité et la chance d’aider les parties prenantes au conflit, le Front Polisario et le Royaume du Maroc, à trouver une solution juste et mutuellement acceptable, selon la formule consacrée.
Tout au contraire, tout laisse croire que la France persiste dans son attitude d’hostilité contre les Sahraouis et leurs alliés Algériens.
Mettant à profit, ces derniers temps, la volonté du pouvoir central espagnol de vouloir marquer, devant son opinion publique, des points dans sa lutte contre les indépendantistes basques, la France n’hésite pas de lui refiler, de temps à autre, en échange d’un appui à la politique expansionniste marocaine au Sahara Occidental, quelques « gros poissons » de l’organisation ETA
Nous pouvons cependant affirmer que la politique française d’hostilité, comme elle n’a pas réussi hier à mettre en difficulté le Font Polisario ni à empêcher le peuple sahraoui de poursuivre son combat de libération, ni à dissuader l’Algérie de se montrer solidaire et partie prenantes de tous les combats pour la dignité humaine, elle ne réussira pas demain à nous faire avaler l’illusoire projet marocain d’autonomie.
Nous n’accepterons désormais, comme solution au conflit qui nous oppose à la France et à l’expansionnisme marocain, que l’indépendance totale de notre territoire. Et rien que l’indépendance totale.
18.02.09
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