Après la décision du Maroc en 1999, officiellement pour protéger ses ressources halieutiques, d'arrêter toute activité de pêche dans "ses" eaux territoriales, décision perçue comme un moyen de pression, l’UE acceptait le partenariat avec le royaume chérifien malgré les carences connues de ce dernier en matière des droits de l’Homme, en échange de l’apport économique qu’allait apporter l’accord de pêche. Cet accord d’association constitue la base juridique des relations entre l’UE et le Maroc. Il souligne l’importance des droits de l’Homme, des principes démocratiques et de la liberté économique ainsi que la nécessité de consolider la paix et la stabilité politique. "Dans la relation entretenue avec l'Europe dès 1969, à travers la Communauté économique européenne, puis l'Union européenne, le Maroc a toujours demandé que l'on reconnaisse et que l’on tienne compte de sa "spécificité". Seulement 3 articles sur les 96 que comporte l'accord concernent l’aspect du dialogue politique au sein de ce partenariat. Le Royaume chérifien avait pourtant tenu à faire des dimensions politique et sécuritaire un élément important, si pas essentiel, de la coopération à mettre en œuvre (Marie-Aurore Vinçotte (Regards d'Occident, 14 octobre 2005). Le terrorisme et la lutte contre l'immigration clandestine sont les points essentiels de ces dimensions. Le 21 janvier 2008, le Ministre marocain des Affaires Etrangères et de la Coopération déclara lors d'un coloque tenu à Rabat sous le thème "Partenariat Maroc-UE : vers la concrétisation du statut avancé" : "Trois années après sa mise en œuvre, la PEV (Politique Européenne de voisinage), l'enseignement majeur qui pourrait en être tiré consiste dans la pertinence du mécanisme de différenciation selon les mérites propres de chaque voisin de l'UE, le niveau de son ambition partenariale et la clarté de son engagement" (Communiqué publié sur le site du Ministère des Affaires Etrangères marocaines). En effet, pour le Maroc, la relation avec l’Union européenne est éminemment politique. "Il s’agit d’une coopération globale au sein de laquelle les volets financier, économique et culturel viennent se fondre dans la dimension politique. Le Maroc souhaiterait que l'Europe tienne compte de son originalité, qu'elle prenne acte de la qualité des relations qu'il a toujours entretenues avec la plupart des Etats membres de l'UE, et qu'elle enregistre le rôle politique et diplomatique important qu'il joue sur la scène internationale et surtout régionale." (Marie-Aurore Vinçotte (Regards d'Occident, 14 octobre 2005) Ainsi, le président de la Fédération Nationale de 'lindustrie de la pêche déclarait à ce sujet :"Les Européens ont changé de mentalité. Ils sont plus soucieux de l’environnement. L’accord actuel, en plus qu’il comporte une dimension politique claire, n’a rien à voir avec celui de 1999", déclarait à ce sujet M. Hassan Sentissi, président de la Fédération nationale de l’industrie de la pêche ("Aujourd'hui le Maroc", le 04/05/2006). Cette dimension politique peut se traduire par le revirement et l'inclinaison européennes devant les pressions marocaines et l'acceptation de cette "spécifité" tant acclamée. Le Maroc atteint ainsi son but d'imposer le silence total sur les violations des droits de l'homme commises tant dans le royaume alaouite qu'aux territoires occupés de la République Arabe Sahraoui Démocratique.
La Conférence Internationale de Juristes sur le Sahara Occidental, tenue à Las Palmas, le 27 et 28 juin 2008, sous-lignait que "Le Sahara Occidental est inscrit, depuis 1963, dans la liste des Territoires Non-autogouvernés, sous le chapitre XI de la Charte des Nations Unies. Le Sahara Occidental a une double nature juridique internationale : C'est un teritoire non-autonome, mais aussi un territoire occupé militairement. Par conséquent, il doit être soumis aux paramètres juridiques du Droit International et à l'application de la IV Convention de Genève de 1949, convention dont le Maroc fait partie depuis 1957. Le Conseil de Sécurité doit procéder à la qualification formelle du Sahara Occidental comme "territoire occupé", à l'instar de ce qu'il a fait avec Gaza en 1980 et le Timor Oriental en 1975" (Saharalibre.es).
Loin de reconnaître le Sahara Occidental comme territoire en litige, l'UE a repris le 18 juillet 2008 les négociations sur le statut avancé du Maroc, dont la partie la plus importante est la coopération économique dans laquelle l'accord de pêche occupe une position notable. La flote européenne pratiquera dans les eaux saharaouis sans le moindre gêne et les européens auront le feu vert pour saccager les ressources naturelles du Sahara Occidental, comme ils l'ont fait tout au long des 32 années précédentes, sans le consentement de sa population qui est, personne ne l'ignore, entièrement contre l'occupation marocaine. En effet, l'UE, le berceau de la démocratie et des droits de l'homme, agit contrairement à ses principes lorsqu'il s'agit des intérêts économiques et géo-politiques. Ainsi, au nom d'une "spécifité" fictive, les états européens ferment les yeux devant les violations des droits de l'homme au Maroc et au Sahara Occidental, reconnaissent implicitement la souveraineté du Maroc sur l'ex-colonie espagnole, volent les ressources halieutiques sahraouis, tout comme ils ont agressé l'état souverain de la Serbie en soutenant la déclaration unilatérale d'indépendance du Kosovo contre le principe de l'intangibilité des frontières héritées du colonialisme.
Dans le cadre des "progrès" realisés par le Maroc en matière de droits de l'homme, à la demande de l'UE, voici un exemple illustré, résultat de la spécifité marocaine :
(voir les images captées pendant la représsion du soulèvement de Sidi Ifni, 7 juin 2008. Source : youtube)
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