Guerre du Sahara occidental: quand les tortionnaires et les envahisseurs se rejettent la balle de leurs atrocités restées impunies
par Me Takioullah Eidda[publié originalement sur CRIDEM (Carrefour de la République Islamique de Mauritanie)]
En tant que mauritano-sahraoui, ma coupe est pleine, vraiment pleine. J'en conviens que ça fait longtemps que ce débat aurait dû être fait, ou dirais-je, ça fait longtemps que cet abcès, puant, aurait dû être crevé.
Drainé jusqu'ici, mais jamais traité, de peur qu'il nous fasse encore plus mal, cet abcès a fini par nous éclater en face. Pourtant, le mal a déjà été fait de part et d'autre, mais souffrant du «Syndrome de Stockholm», on l'a enfui au fond de nous mêmes sans jamais chercher à s'en libérer.
Alors, le temps de faire la thérapie collective est manifestement arrivé. Et vous ne le devinez jamais, cette thérapie est arrivée de là où on l'attendait le moins: la Télévision de Mauritanie (TVM).
Eh oui, qui l'aurait cru! La TVM qu'on connait, longtemps domestiquée par les pouvoirs publiques, avec ses programmes plates de propagande, sans fond ni forme, sans saveur, inodore et incolore, nous sert en 2013 un programme aussi audacieux sur les séquelles de la guerre du Sahara Occidental.
Un vent de changement souffle certainement sur l'espace audio-visuel en Mauritanie. En tout cas, un grand merci au présentateur du programme: Dr Cheikh Ould Sidi Abdellahi, d'ailleurs que je ne connais point.
Après des décennies, chacun des acteurs essaie lâchement de s'en laver les mains dans la cour de l'autre. À commencer par l'acteur principal de cette guerre, Mokhtar Ould Daddah, dans son livre "La Mauritanie contre vents et marées", Mohamed Khouna Ould Haidalla et aujourd'hui le Polisario, en réaction à la diffusion du programme de la TVM (El Fadaa El Thaqaffi), consacré aux traitements des prisonniers mauritaniens capturés alors par le Polisario.
Au fond, qu'est ce que nous apprend le programme de la TVM sur cette guerre qu'on ne connait pas déjà? Rien, sauf peut être de constater combien les dirigeants, de l'époque, du Polisario et de la Mauritanie, ont été si sanguinaires et si lâches.
L'invité, Mohamed Fall Ould Emed, avec qui je sympathise beaucoup, nous a servi un côté seulement de l'histoire, avec une amertume évidente, voire teintée de mauvaise foi, contre l'ancien Président Khouna Ould Haidalla. Je reviendrai sur ce point dans ma deuxième partie.
Il faut le dire, tant le Polisario que la Mauritanie ont été instrumentalisés dans ce conflit par les frères ennemis algéros-marocains, en fonction d'agendas expansionnistes et stratégiques, qui ne servent que ces deux pays, au détriment de tous les pays de la région.
Tares qu'ils étaient, nos dirigeants mauritano-sahraouis se sont rabattus, en véritables tortionnaires, sur les populations maures, en les divisant et en les mobilisant les unes contre les autres, au nom de concepts qu'ils ont mal assimilés dans leur mise en œuvre, aussi bien que dans l'intégration des profondeurs de leurs conséquences: "l'indépendance" pour le Polisario et "l'annexion" pour la Mauritanie.
Pourtant, ni la Mauritanie ni le Polisario n'avaient de leadership ni les capacités économiques ou structurelles qui leur permettaient d'atteindre les objectifs qui se sont fixés: asseoir une République Sahraouie au Sahara Occidental, d'un côté; et annexer ce territoire, en unissant les populations maures sous la tente mauritanienne, de l'autre.
Me Takioullah Eidda, avocat
Québec, Canada
10.07.13
quebec171[at]gmail.com
(partie 2)
Guerre du Sahara occidental: Mokhtar Ould Daddah a créé le Polisario, mais le braque contre la Mauritanie.
par Me Takioullah Eidda[publié originalement sur CRIDEM (Carrefour de la République Islamique de Mauritanie) 14.07.13]
Dans ma première partie, je concluais sur le fait que tant le Polisario que la Mauritanie ont été instrumentalisés dans ce conflit par les frères ennemis algéros-marocains, en fonction d'agendas expansionnistes et de stratégies, qui ne servent que ces deux pays, au détriment des peuples maures et, au-delà, tous les peuples de la région.
Tarés et novices qu'ils étaient, et sans se poser la moindre question, nos dirigeants mauritano-sahraouis se sont rabattus, en véritables tortionnaires, sur les populations maures, en les divisant et en les dressant les unes contre les autres, au nom de concepts qu'ils ont mal saisis, tant au niveau de leur mise en œuvre que dans l'intégration des profondeurs de leurs conséquences: "l'indépendance" pour le Polisario et "l'annexion" pour la Mauritanie.
Pour soutenir de telles affirmations, j'aborde aujourd'hui les circonstances de la naissance du F.Polisario et les manœuvres, lâches, cyniques et sournoises du Président Mokhtar Ould Daddah dans la création de ce mouvement, lequel va finir par se tourner contre lui et, par conséquent, la Mauritanie et ainsi dévier le trajectoire de ce pays à tout jamais.
I- Naissance du Polisario et doubles jeux du Pr Mokhtar Ould Daddah
Jusqu'au début de 1974, El Welly Mustapha Sayed, que Dieu ait pitié de son âme, (fondateur du F.Polisario, mort sur le chemin de retour de l'attaque de Nouakchott 1976) était encore au Maroc. Le Polisario en tant que mouvement, n'existait tout simplement pas. À la même période, un certain Mhemed Ould Zeiou, recherché par les Espagnols (devenu plus tard président de l'Assemblée sahraouie), est venu s'installer avec sa famille à Zouerate.
Il fut rejoint par Ahmed Ould Beirouk et sa famille. Les deux familles allaient être à Zouerate le point de chute et l'encrage de toute la jeunesse sahraouie venant du Maroc et du Sahara Espagnol. C'est le début des balbutiements du F.Polisario et sa naissance dans la ville de Zouerate en Mauritanie.
Arrivé clandestinement à Zouerate en provenance de Zak (Maroc), à bord d'une Land-Rover, El Welly Mustapha Sayed est venu rejoindre le groupe. Soutenus et intégrés par les familles mauritano-sahraouis et des membres influents, connus, du mouvement des Kadihines, tels El Khalil Ould Sidi Mohamed (Allah Yarhmou we ghamdou Bjenatous el naïmaa), Said Ould Fillali ..., les "révolutionnaires sahraouis en herbe" ont vite pris mèche avec les autorités mauritaniennes.
El Welli Moustapha Sayed a pu accéder au Président Mokhtar Ould Daddah, grâce aux contacts d'un homme d'affaires de Nouakchott: Veten Ould Rgeiby (Allah Yarhmou).
Relation timide à ses débuts, versant dans le paternalisme par la suite, elle finie par formellement s'imposer au début de 1975. Misant sur la stratégie de contrôle graduelle, le Président Mokhtar Ould Daddah, voyait dans la création d'un mouvement politique sahraoui une carte à utiliser auprès de ses voisins maroco-algériens et, bien sûr, et surtout, un moyen et une opportunité, inespérés, de pénétrer les populations sahraouies.
Alors, le Président Mokhtar Ould Daddah donne son feu vert à l'installation des membres du mouvement dans la région du Nord, notamment à Zouerate, et leur permet libre circulation en Mauritanie.
II- Manœuvres du président Mokhtar Ould Daddah
On est au printemps de 1974, c'est l'année de naissance du F.Polisario en Mauritanie. Sa première réunion constituante, tenue à Zouerate, au mois de mai 1974, est déclarée de facto, tenant lieu de premier Congrès du mouvement. Congrès très rudimentaire à tous les égards: il y avait là, entre autres, El Welli Mustaphe Sayed (Allah Yarhmou), Mhemed Ould Zeïyou, Louchaa Ould Oubeïd (Allah Yarhmou), Mohamed Lemine Ould Ahmed, etc...
Un Conseil exécutif fut mis en place et ses membres ont été désignés suivant l'importance des régions. Mahfoud Ali Beiba (Allah Yarhmou) est l'une des personnes les plus importantes à être désignées en son absence (l'Aïoun) et qui mérite d'être soulignée ici.
Comme je l'ai déjà signalé, compte tenu de la docilité et la bonne foi de El Welli Mustapha Sayed, le Président Mokhtar pensait que ce mouvement allait lui servir de tremplin et d'instruments auprès des populations sahraouies. Mais, les choses n'allaient pas se passer comme il les fantasmait.
À la même époque, soit à la fin de l'Été de 1974, un autre groupe, cette-fois ci au sein Sahara Occidental, à sa tête Ikhalihena Ould Rachid, soutenu par l'Espagne, créé le PUNS (Parti d'Union Nationale Sahraouie).
El Welli Mustapha Sayed était un garçon brillant, expressif, cultivé, grand unioniste, panarabiste et foncièrement anti marocain et Espagnol. Il respectait énormément le Président Mokhtar Ould Daddah, qui l'appelait d'ailleurs affectueusement Lemrabett (le marabou). Encouragé en cela par la position du Président Mokhtar Ould Daddah dans la résolution finale sur le Sahara Occidental faite à la fin du sommet tripartite (Mauritani/Maroc/Algérie) à Nouadhibou le 14 septembre 1970.
El Welly Mustapha Sayed n'a jamais pensé, un instant, que le Président Mokhtar Ould Daddah pourrait être du côté du Maroc, et ce, pour quelques raisons que ce soient, compte tenu du poids de l'Histoire entre la Mauritanie et le Maroc.
Si bien que El Welly Moustapha Sayed commençait à verbaliser, ou si on veut, fantasmer et même proposer au Président Mokhtar Ould Daddah, avec le plus grand sérieux, la mise en place d'un projet d'une Confédération entre sahraouis et mauritaniens.
N'oublions pas que El Welly est un panarabiste-nassiriste convaincu: idéologie qui, à l'époque, a du vent dans les voiles en prônant la réunification du Monde Arabe, avec les expériences entre l'Égypte, la Libye, la Syrie, l'Irak, etc.
De plus, le Président Mokhtar Ould Daddah a laissé croire à El Welly Mustapha Sayed qu'il était réellement sérieux dans son rôle de parrain dans la cause sahraouie. Tellement convainquant, qu'il a proposé et supervisé les négociations de rapprochement entre le PUNS et le Polisario, négociations menées en Mauritanie par Ikhalihena Ould Rachid, du PUNS, et El Welli Mustapha Sayed, accompagné de Mahfoud Ali Beiba du côté du Polisario.
Mais, le Président Mokhtar Ould Daddah, lâche et cynique qu'il était, ne voyait pas les choses de la même façon qu'il le laisser croire à notre idéaliste El Welly.
Au contraire, pour le Président El Mokhtar, tout en signant en 1971 des accords de partage secrets avec Hassan 2 (La Mauritanie contre vents et marées), les sahraouis sont des populations maures, périphériques à la Mauritanie. Par conséquent, la décolonisation de ce territoire doit se matérialiser par son intégration, si nécessaire par la force, à l'ensemble mauritanien sous la coupole de la République Islamique de Mauritanie.
Mais, comme dit le philosophe, "même la vertu nécessite les moyens". Or, La Mauritanie et son gouvernement venaient tout juste de naître, n'avaient aucun lien avec ces populations et n'avaient jamais pris aucune mesure de nature politique ou économique, qui leur permettait de prétendre à de telles ambitions.
Avec la position expansionniste de plus en plus exprimée par le Président Mokhtar Ould Daddah, la fracture et le schisme entre le F.Polisario et la Mauritanie paraissaient évidents, voire inévitables. Et le coup de grâce de la rupture arriva avec la visite de la Commission des Nations-Unies en mai 1975 et l'accord tripartite de Madrid du 14 novembre de la même année.
C'est la Guerre! Nous verrons dans la prochaine partie combien la Mauritanie et le Polisario sont mal outillés pour entrer dans une guerre qui au fond, si elle devrait avoir lieu, elle aurait due être entre l'Espagne et le Maroc, pas entre le même peuple de El Bidhans. Combien ils étaient rancuneux, se mal traitent les uns les autres et mal traitent les populations, en procédant aux profilages raciaux, tribaux et ethniques. Nous verrons aussi le pourquoi de l'attaque contre la capitale Nouakchott.
(partie 3)
Guerre du Sahara occidental : Mokhtar Ould Daddah créé le Polisario, et le braque contre la Mauritanie.
par Me Takioullah Eidda[publié originalement sur CRIDEM (Carrefour de la République Islamique de Mauritanie) 18.07.13]
Dans la deuxième partie, nous avons vu comment le F.Polisario a vu le jour dans la ville de Zouerate au Nord de la Mauritanie.
Nous avons vu aussi le double jeu, cynique et sournois, du feu le Président Mokhtar Ould Daddah (Allah Yarhmou), profitant de la conception idéaliste, voire naïve, de El Welly Mustapha Sayed (Allah Yarhmou) relativement à l'avenir du Sahara Occidental, indépendant ou à l'intérieur d'une fédération, avec la Mauritanie.
Ce double jeu a fini par se mettre à nu au grand jour avec l'accord tripartite de Madrid, le 14 novembre 1975, et ainsi imposer la fracture entre le Polisario et son parrain feu le Président Mokhtar Ould Daddah.
Dans cette partie, j'aborderai sommairement l'état des lieux des parties: la Mauritanie et le F.Polisario, afin de montrer combien elles étaient mal outillées et préparées pour entrer dans cette maudite guerre.
Par la suite j'aborderai le caractère tribal du nationalisme sahraoui, lequel, après la mort de El Welly Mustapha Sayed, fini par plonger le mouvement dans une guerre intestine entre ses tendances marocaines, algériennes, mauritaniennes et sahraouies: c'est la période de la grande purge contre les sahraouis d'origines mauritaniennes.
I- Etat des lieux en Mauritanie au mois de novembre 1975
En 1975, la Mauritanie est un pays paisible. Des cultivateurs sur les berges du fleuve. Des nomades éleveurs dans les Hodhs et au centre, vivants au crochet d'une économie pastorale, laquelle est dépendante, à son tour, de la pluie et du beau temps. Dans le Nord, des ouvriers dévoués, à Nouadhibou et à Zouerate, qui, grâce à leur labeur, l'État mauritanien arrive à prouver et maintenir, symboliquement, son existence.
Sur le plan des infrastructures, celles-ci sont à 95% inexistantes. La route de l'espoir, Nouakchott-Néma, est encore en chantier. La région du Nord, poumon de l'économie nationale, est complètement enclavée. l'Adrar et l'Inchiri n'en parlons pas. Bref, rien! Sur le plan des institutions, tout le monde est sardiné au sein des structures du parti unique le PPM et aucune voie de dissidence n'est tolérée. Il n'y avait pas d'administration au sens propre du terme.
L'armée comptait plus ou moins 3000 à 5000 hommes, équipés de fusils masse-36 (dont le tiers est composé de goumiates, patrouillant à dos de chameaux).
Tous ses bataillons confondus, de blindés, infanteries et d'artilleries, sont équipés de quelques 20 véhicules blindés légers AM-60, dont une bonne partie est en panne mécanique avancée. Et pour terminer, deux avions de type Skyvan, reçus en décembre 1975, viennent boucler le compte .
La seule chose concrète et objective que la Mauritanie disposait en 1975, était le gisement de la mine de Tazadit à Zouerate. Située sur la frontière avec le Sahara Occidental, cette mine est exploitée à ciel ouvert et son chemin de fer d'exportation est exposé, en plein désert, sur des dizaines de Km à la ronde et s'étale sur 650Km de longueur.
Sur le plan diplomatique, il n'y a plus percutant que le constat d'Abdelaziz Dahmani (Jeune Afrique 1974, No 702): «L'ampleur des desseins de la diplomatie mauritanienne est freiné dans son action par la médiocrité des moyens matériels et humain dont dispose le pays».
C'est ça le topo de la réalité de la Mauritanie au jour du 14 novembre 1975. Et feu le Président Mokhtar Ould Daddah était le mieux placé pour le savoir. La dernière chose à laquelle pensait la population mauritanienne était la guerre.
Surtout pas contre des frères bidhanes, pour des milliers de km de Sahara "inutile", alors que la Mauritanie ne savait pas quoi faire de ceux qu'elle possède déjà. Comment une personne, à priori intelligente, modérée et raisonnable, comme feu le Président Mokhtar Ould Daddah, qui a construit la Mauritanie "contre vents et marrées" puisse penser un instant aller en guerre dans un état pareil et avec son ennemi de tous les temps: le Maroc.
Le Maroc qui a revendiqué la Mauritanie sur tous les forums, devant toutes les instances et à toutes les occasions. Le Maroc qui a corrompu l'élite naissante de la Mauritanie; qui a armé des groupes pour la déstabiliser et qui lui a nié son identité et son être "bilades El Bidhans"!
De surcroît, cette guerre est menée contre un peuple frère de EL'Bidhans et un pays ami et respectueux comme l'Algérie. L'Algérie qui a été aux côtés de la Mauritanie lors de la mise en place de l'Ouguiyas et sa garantit (Christine Dauré-Sarfaty, La Mauritanie, L'Harmattan, 1993). Elle a été aussi à ses côtés lors de la nationalisation de la Miferma (Mauritanie contre vents et marées), où feu Président Mokhtar Ould Daddah témoigne de cette solidarité historique.
Pour ma part j'émets une hypothèse, rien qu'une hypothèse. Pour moi, le sentiment personnel de feu le Président Mokhtar Ould Daddah, sa loyauté à sa confrérie très proche du Maroc, ont fini par prendre le dessus sur son devoir et sa responsabilité de chef d'État de la Mauritanie. Sinon, comment expliquer cette décision? Aidez-moi? Aucun autre élément, autre que la folie, ne peut justifier l'entrée de la Mauritanie dans cette guerre perdue d'avance et sans raison.
II- Etat des lieux au front Polisario au mois de novembre 1975
Comme je l'ai déjà dit, le F.Polisario n'existait pas avant 1974. Et sa naissance après cette date ne lui a pas donné une force nouvelle, autre que symboliquement politique sur le plan de la mobilisation des masses à l'intérieur du Sahara Occidental et, un peu, dans les pays limitrophes, lors de la visite de la Commission des Nations-Unies au mois de mars-mai 1975.
Sur le plan militaire, de l'organisation et de moyens, le Polisario était complètement à terre et inexistant. Il n'avait pas de présentations dans aucun pays, pas de véhicules, pas de soldats, pas d'armes de quelques sortes et pas d'argent. À cet égard, je raconterais une anecdote loufoque, dont son Excellence Ahmed-Babe Miske peut certainement en témoigner.
Au mois d'octobre 1975, le SG du F.Polisario, El Welly Mustapha Sayed, est parti à Bamako, accompagné de Brahim Ghali, alors membre du Bureau Politique, pour sensibiliser le Président Moussa Traoré et, à travers lui, le Président Sékou Touré (que Dieu ait pitié de son âme). Comble de malheur, ils n'ont pas rencontré le Président Traoré et ils étaient restés cloués à Bamako durant plusieurs jour faute d'argent et de billets de voyage.
C'est ça la réalité du F.Polisario à la fin de l'Été de 1975. Sur le plan de l'organisation, le front Polisario reposait uniquement sur le dynamisme et le leadership de deux personnes, lesquelles étaient la poutre, la charpente et la colonne vertébrale du mouvement: El Welly Mustapha Sayed et Mahfoud Ould Ali Beiba (Allah Yarhmou). Le premier s'occupait de toutes les affaires extérieures du mouvement et le deuxième s'occupait de toutes celles relatives à l'intérieur. À cette époque l'Algérie ne reconnaissait même pas le F.Polisario en tant que mouvement sahraoui. Elle soutenait plutôt, avec bureaux pignon sur rue, le MOREHOB (Mouvement Révolutionnaire des Hommes Bleus): mouvement anti-espagnol fondé par Moha R'Gueibi, dit Edouard Moha ( Bernard Lugan, Histoire du Maroc, Ed. Criterion, Paris 1992).
Donc, l'Algérie, à la fin de l'Été 1975, ne donnait pas un centime au Polisario et ne le reconnaissait tout simplement pas. Cependant, elle ferme les yeux sur sa frontière poreuse avec le Sahara Occidental, ce qui a permis au F.Polisario de trouver aide et support auprès de la communauté sahraouie-algérienne dans la région Tindouf.
Ce n'est qu'au mois de décembre 1975, suite au flue massif de réfugiés sahraouis vers l'Algérie, après la pénétration des troupes marocaines dans le Nord du Sahara Occidental (même à Dakhla) et les troupes mauritaniennes dans le Sud, Leguera et Awserd, que les algériens ont commencé à soutenir directement le Polisario.
Mais dans l'Histoire de cette maudite guerre, les algériens n'égaleront jamais la générosité de l'aide de Mouamar Kaddafi (que Dieu ait pitié de son âme), laquelle a aussi commencé la même période, pas avant, et ce, malgré les invitations répétées à cet égard de Kaddafi à feu Mokhtar Ould Daddah durant les années 70.
Maintenant l'État de lieux des parties exposé, j'aborderai le caractère du nationalisme tribal du Polisario et comment ce nationalisme tribal a compartimenté ce mouvement en tendances hétérogènes.
III- Nationalisme tribal et tendances au sein du Polisario
Le nationalisme sahraoui est d'abord et avant un nationalisme tribal. En effet, tous les membres influents du Polisario, et presque tous les membres de ses structures, viennent de la même tribu: El R'Gueibatt. Cette réalité tribale caractérise ce mouvement de façon verticale et horizontale.
Toutefois, cette grande tribu, qui est les R'Gueibatt, trouve des tentacules dans tous les pays de la région. Certes, majoritairement au Sahara Occidental, mais les fractions, nomades ou sédentaires, de cette tribu se trouvent depuis des décennies en Mauritanie, au Maroc et en Algérie: sociétés et pays dans lesquels ces fractions ont évolué sur tous les plans, notamment sur le plan culturel, économique et social.
Forte qu'elle puisse être dans sa couverture parapluie, il n'en demeure que cette dimension tribale du nationalisme sahraoui portait en elle-même, ou dans son sillage, une hétérogénéité culturelle, liée essentiellement aux modes de vie, entre les groupes venants de chacun des pays limitrophes, compte tenu du poids des facteurs d'intégration.
C'est la raison pour laquelle ont trouve au sein du Polisario, à tous les niveaux, des sahraouis qui n'ont jamais vu le au Sahara Occidental, encore moins mis les pieds dans ce territoire.
Pas plus que leurs parents ou grands-parents avant eux. On n'est donc pas en présence d'un nationalisme territoriale à proprement parler, source évidemment d'homogénéité culturelle, mais d'un nationalisme tribal, qui est, quant à lui, source d'hétérogénéité culturelle et donc porteur de conflits intestines inévitables que nous verrons plus loin.
Le caractère tribal du nationalisme sahraoui, sommairement exposé plus haut, allait compartimenter le Polisario et ainsi créer des tendances à l'intérieur de ce mouvement. Il y a d'abord, la tendance marocaine (El Voughraa), la tendance algérienne (Lguwacem), puis la tendance du Sahara Espagnol (Lebeihatt) et enfin la tendance mauritanienne (Ewlad Moussa).
Il faut dire que c'est la tendance marocaine qui s'était attribuée la part du lion à la naissance du Polisario en 1974 (EL Welly Mustafa Sayed, Md Lemine Ahmed, Oumar Hadrami, Md Abdelaziz & Bachir Mustapha Sayed), et ce, pour une raison simple: le PUNS (Parti d'Union Nationale Sahraouie) de IKhalihina Ould Rachid a intégré toute l'élite et cadres se trouvant au Sahara Occidental, de sorte que seul Mahfoud Ali Beiba, incontournable dans le territoire, a pu être nommé membre du Comité exécutif. Plus tard, par la force des choses, je dirais par la force de la guerre, Eyoub Ould Lehbib sera intégré au Comité exécutif.
Les autres membres du Comité Exécutif appartiennent à la tendance algérienne, à savoir Md Lemine Ould Bouhali et Sidi Ahmed Battal, lesquels, comme on verra plus loin, allaient prendre le contrôle et l'initiative du mouvement à compter de 1980.
Comme je l'ai déjà dit et je le répète, El Welly Mustapha Sayed était l'exception de toutes ces tendances qui confirme la règle de leur existence. Il était un grand rassembleur, un maure dans la chaire et dans le sang. Il aime la culture mauritanienne (Elhowl), sa simplicité, son caractère nomade insouciant, un peu bohémien et détaché des choses.
La période qu'il a passé en Mauritanie a été pour lui, je pense, des moments de ressourcement indescriptibles et inégalés. El Welly était comme un aimant. Il attire tous ceux qui entrent en contact avec lui.
C'est comme ça que beaucoup de mauritaniens se sont retrouvés du côté du Polisario lorsque la guerre a éclaté en 1975. Ces sympathisants, parmi lesquels j'ai été, viennent en faite de toutes les tribus et familles mauritaniennes: Ehl Hamdi et Ehl Meske (Ehl Barikalla), Ehl Bouh (Ewlad Eberry), Ehl Abdellahi, Ehl Nweigeth (Smassid), Ehl Tiyeb (Cherfaa), Ehl Haidalla (Laroussiyine), Ehl Eleya (Ewlad Besbaa), Ehl Lkhalil, Ehl Lyezid (Ewlad ghadhi), Ehl Maaleïnine (Lechyakh), Ehl Soueilem et Ehl Sidi Mohamed (Ewlad Dleim), Ehl Chadli ..., pour ne citer que ceux-la.
La guerre se déclara au mois de décembre 1975, avec l'attaque sur Bir Ougrein et Aïn Bentilli, du côté mauritanien, et Amgalla du côté marocain. Ici je rectifie une certaine information très rependue selon laquelle se les algériens qui ont conduit ces attaques.
Jamais au grand jamais, les algériens n'ont pris part aux attaques de Bir Oumgrein ou de Aïn Bentilli. Certes, leur matériel fut utilisé, avec le drapeau algérien. Côté marocain, oui, les algériens ont pris part aux opérations pour la première et la dernière fois à Amgala, au mois de janvier 1976. Mais côté mauritaniens, jamais.
Et ce n'étaient pas les sahraouis qui ne le voulaient pas. Loin de là. Mais se sont plutôt les algériens qui ont eu la frousse, suite au nombre de blessés, de prisonniers et de morts qu'ils ont subi à Amgala.
Donc, la guerre a éclaté et El Welly Mustapha Sayed a été si affecté par l'adhésion de la Mauritanie à l'accord tripartite de Madrid, signé entre la Mauritanie, le Maroc et l'Espagne, qu'il en fait une obsession maladive. Pour lui, feu le Président Mokhtar Ould Daddah ne pouvait pas faire une chose pareille pour les sahraouis, surtout après tant de promesses, de tutorat et de proximité avec le mouvement sahraoui.
El Welly Mustapha Sayed se sentait profondément trahi, manipulé et humilié dans son orgueil de maure, de guerrier, de révolutionnaire et d'idéaliste. Si bien que dans ses discours, il n'arrive plus à retenir ses émotions et interrogations.
Pour mesurer à quel point il en voulait à feu le Président Mokhtar Ould Daddah, voici un passage de son discours du mois de février 1976: "Pourquoi? Pourquoi? Pourquoi cette trahison? Par cupidité? Mais nous aurions largement partagé nos richesses. Par ambition? Pour grandir ses domaines d'un bout de plus de notre Tiris?
Mais nous étions prêts à lui offrir la présidence d'un État Fédéral, englobant tout le Sahara, au lieu d'un morceau que lui laisse Hassan II et qui n'aura de toute façon pas. Pourquoi vendre ainsi ses frères et ouvrir la voie à l'annexion de son propre pays?» (www.oulala.net/Portail/spip.php?article4088)
Pour El Welly, la riposte doit venir au plus vite, avec la plus grande force et avec la plus grande surprise, contre le "petit palais" de "l'Emrabett" (feu le Président Mokhtar Ould Dadda). C'est en ces termes que El Welly Mustapha Sayed l'a qualifié un jour du mois de février de 1976 lors d'une réunion de cadre tenue à Rabouni, près de Tindouf.
Contrairement à ce qui a été dit, l'objectif de El Welly dans son attaque sur Nouakchott était de détruire le Palais présidentiel, casser le moral des troupes et du gouvernement mauritanien, pas plus. Pour cette opération, il a choisi lui-même les meilleurs des meilleurs, en termes de connaissance du terrain, d'endurance, de conviction et d'engagement.
"Il ne s'agissait pas de frapper le principal ennemi, mais le frère qui avait trahi "le sang et les serments", pour reprendre les termes de son Excellence Ahmed Babe Miské. Le 8 juin 1976, El Welly Mustapha Sayed attaque le palais présidentiel à Nouakchott et meurt sur le chemin de retour dans la région de l'Inchiri.
Avec la mort de El Welly, le Polisario venait de perdre son cerveau et sa colonne vertébrale: c'est la guerre intestine au sein du mouvement pour la succession de El Welly Mustapha Sayed (allah Yarhmou) et la grande purge allait commencer contre les mauritaniens, toutes origines confondues, orchestrée par des tortionnaires sans pitié et sans limite, à savoir, tenez-vous bien, El Bechir Mustapha Sayed (le frère de El Welly) et Sidi Ahmed Batal.
C'est ce que nous verrons dans la prochaine partie.
(partie 4 et fin)
Guerre du Sahara occidental: Les sahraouis d'origine mauritanienne persécutés par la Mauritanie et le Polisario
par Me Takioullah Eidda[publié originalement sur CRIDEM (Carrefour de la République Islamique de Mauritanie) 24.07.13]
Dans la troisième partie, nous avons vu l'état des lieux des belligérants au 14 novembre 1975. Combien la Mauritanie était sans moyens pour entrer dans ce conflit fratricide contre le peuple frère du Sahara Occidental.
Surpris par l'invasion mauritanienne et forcé de quitter son territoire, le peuple sahraoui s'est réfugié en territoire algérien, d'où il a lancé une véritable offensive, dirigée par El Welly Mustapha Sayed (Allah Yarhmou), contre le Palais présidentiel à Nouakchott et l'économie mauritanienne dans ses artères les plus vitaux, ridiculisant ainsi la décision expansionniste du Président Mokhtar Ould Daddah (Allah Yarhmou) devant le peuple mauritanien et le monde entier.
Après la mort de feu El Welly dans l'attaque de Nouakchott, sa succession a déclenché une guerre intestine entre les tendances régionales du F.Polisario, dont la conséquence a été la marginalisation et la persécution aveugle des sahraouis et sympathisants d'origine mauritanienne.
Dans cette partie, j'aborderai le jeu de coulisse et de truquage lors du troisième congrès du F. Polisario tenu au mois d'août 1976, lesquels jeux et truquage ont abouti à la consécration des principaux éléments de la tendance algéro-marocaine au sommet des postes clefs de la hiérarchie du mouvement. On verra par la suite la grande purge dont les sahraouis d'origine mauritanienne ont été victimes.
I- TROISIÈME CONGRÈS DU POLISARIO ET DOMINATION DES TENDANCES ALGÉRO-MAROCAINE
La mort de El Welly a été pour toute la population sahraouie, particulièrement pour nous compagnons de la première heure (dans mon cas depuis décembre 1974), un vrai choque et un vrai coup de massue. Car il était le joint, la reliure et l'aimant entre nous tous. La particularité de El Welly réside dans sa capacité de faire croire à chacun de nous, singulièrement, qu'il était le plus important et le plus indispensable de tous. À prime àbord, on peut voir ça comme une sorte de manipulation. Mais, avec le recul, je ne le crois pas: El Welly croyait tellement à la cause de «Moujtamaa El-Bidhanes».
Après la mort de El Welly, deux personnes du Comité exécutif ont pris les rênes des préparatifs et de l'ordre du jour du troisième Congrès du mois d'août 1976: Omar Hadrami et Bachir Mustapha Sayed (frère de El Wely). Tous les deux appartenaient à la tendance marocaine du mouvement et de son aile la plus négationniste des autres, surtout ceux qui venaient de la Mauritanie ou liés de près ou de loin à ce pays et à sa culture.
Pour eux, les sahraouis et sympathisants d'origine mauritanienne sont plus mauritaniens que sahraouis et donc le mouvement ne doit pas leur faire confiance. D'autant plus, que ces sahraouis n'arrivent pas à se débarrasser de cette culture mauritanienne d'El-Bidhane (Ehl Lkreiatt), caractérisée par la lenteur le relâchement et la promiscuité.
Pour les sahraouis d'origine marocaine ou algérienne, ceci est tellement vrai que la femme sahraouie d'origine mauritanienne est l'égale à l'homme par opposition à leurs femmes domestiquées et drapées dans des burqas. Pour nous, venant de la Mauritanie cette berbérité culturelle des tendances algéro-marocaine du F.Polisario nous choque et nous interpelle dans nos relations avec eux.
Mais, vous l'imaginez, compte tenu de la situation de guerre, le temps n'était pas à la discussion encore moins au débat social. D'autant plus que le Polisario était un mouvement révolutionnaire marxiste dont les structures fonctionnent selon une hiérarchique rigide, caractérisée par le culte de la personne, dont les choix et orientations sont "indiscutables et irréprochables".
À cet imbroglios culturel, s'ajoute le fait que la tendance berbère (algéro-marocaine) essaie de culpabiliser les sahraouis et sympathisants d'origine mauritanienne pour la "trahison" de feu le Président Mokhtar Ould Daddah à l'égard du peuple sahraoui frère et bien sûr la mort de son leader El Welly Mustapha Sayed. Donc, il y avait là un malaise réel non expliqué et bien sûr non résolu entre la tendance sahraouie d'origine mauritanienne et la tendance berbère (algéro-marocaine).
C'est dans cette ambiance que c'est tenu le troisième Congrès du 26 au 30 août 1976 pas loin de Rabouni à 20km de Tindouf. Les deux tendances (marocaine et algérienne) ont fini, comme prévu, par imposer leurs choix et positionner leurs pions à tous les niveaux. Pour commencer, elles sont allées chercher Mohamed Abdelaziz, un sahraoui presque inconnu venant du Sud du Maroc, pour le trôner Secrétaire Général du F.Polisario (chef du Conseil de la révolution).
Quelques jours après, Mohamed Abdelaziz épousa Khadija, fille de Hamdi Ould Abdellah (Vougraoui), Maire de Tindouf depuis l'indépendance de l'Algérie. La désignation surprenante de Mohamed Abdelaziz a été faite au détriment de Mahfoudh Ali Beiba (Allah Yarhmou), alors Secrétaire général-adjoint et SG par intérim suite à la mort de El Welly. Il était le seul à pouvoir se vanter d'être le Grand militant, le fils et le ressortissant de la ville d'El Aïoun au cœur du Sahara Occidental. Son malheur venait du fait qu'il n'appartenait pas à la tribu de "Rgueibatt El Voughraa" et donc isolé au sein du Comité exécutif du mouvement.
Ensuite, elles sont allées chercher Mohamed Lemine Ould El Bouhali (actuel ministre de la défense), natif de Tindouf ancien militaire algérien d'origine sahraouie, pour le nommer membre du Comité exécutif. Puis, elles sont allées chercher Sidi Ahmed ElBatal, algérien d'origine sahraouie, natif de Tindouf, pour le nommer membre du Comité exécutif chargé de la Sécurité militaire et politique: en bon français, cela veut dire le Pol Pot du Polisario comme on verra plus loin.
Fort de la sympathie générale dont il jouissait suite à la mort de son frère dans les circonstances qu'on connait, Bachir Moustapha Sayed s'est fait désigner Secrétaire Général Adjoint chargé de la permanence du F.Polisario, puisque le SG Mohamed Abdelaziz s'occupait de la coordination entre les fronts militaires.
Cette position stratégique et l'absence quasi permanente de Mohamed Abdelaziz, vont permettre à Bechir Mustapha Sayed de mettre la main sur toutes les affaires intérieures du mouvement, sa coordination, et se parachuter au besoin dans les affaires extérieures, en prenant la tête d'une importante délégation à l'étranger ou dans les négociations cruciales, comme ça été le cas dans le processus de paix avec la Mauritanie.
Finalement, les deux tendances (marocaine et algérienne) ont placé Oumar Hadrami, natif de Casablanca (rallié le Maroc en 1991), comme membre du Comité exécutif, responsable du Comité Extérieur du F.Polisario à Alger, chargé de la coordination avec les autorités algériennes.
Marginalisée et isolée, aucun membre de la tendance mauritanienne n'a pu accéder au Comité exécutif (Conseil de la Révolution). Pire, Brahim Hakim (rallié le Maroc en 1992) qui était Ministre des affaires étrangères de la RASD n'avait même pas été élu membre du Bureau Politique, alors que des ministres juniors comme ceux de l'information (Md Salem Ould Salek) du commerce, etc ... l'ont été!
II- TORTURES ET MAUVAIS TRAITEMENT DES MAURITANIENS D'ORIGINE SAHRAOUIE EN MAURITANIE
La guerre a été une catastrophe pour les citoyens de la Mauritanie d'origine sahraouie. Ils ont subi toutes sortes de mauvais traitement; des fonctionnaires licenciés; des responsables rétrogradés ou accusés lâchement sans preuve; des hommes et des femmes emprisonnés au seul motif qu'ils appartenaient à la tribu de Rgueibatt ou avaient des liens avec cette tribu ou une autre de Ehl Sahel. Des enfants maltraités dans les écoles ou chassés de celles-ci au seul motif que leurs parents sont d'origine sahraouie.
Les autorités mauritaniennes de feu le Président Mokhtar Ould Daddah ont mis en place un système de profilage ethnique et tribal visant uniquement les mauritaniens d'origine sahraouie, si bien que les services de sécurité allaient les chercher en brousse pour les dépouiller de leurs troupeaux sous prétexte que ces troupeaux vont servir ou serviront, directement ou indirectement, au Polisario compte tenu des liens tribaux supposés avec ce mouvement. Même traitement pour les propriétaires des véhicules qui leur ont été carrément enlevés. Pire, à Zouerate, la SNIM et les autorités ont interdit à leurs personnels de ravitailler en eau les familles d'origine sahraouie!!
Soumis à toutes sortes de mauvais traitements en Mauritanie, plusieurs de ces mauritaniens, dont ma famille, ont décidé de quitter leur pays pour le Polisario, en espérant trouver auprès de ce mouvement, en tant soit peu, un réconfort et un peu de respect. Peine perdue.
III- TORTURE ET DISPARUTIONS DES MAURITANIENS D'ORIGINE SAHRAOUIE AU SEIN DU POLISARIO
Comme on dit, "qui veut tuer son chien l'accuse d'avoir la rage." Avec l'arrivée massive des gens en provenant de la Mauritanie ("l'inntilaghaa") en 1977 -1979, Bachir Mustapha Sayed (SG-adjoint chargé de la permanence) et Sidi Ahmed Elbatal (Membre du Comité exécutif, responsable de la Sécurité militaire et politique) ont décidé tout bonnement d'envoyer tous ces arrivés "mauritaniens" (jeunes et vieux, sans exception) dans des camps sécurisés sous prétexte de les entrainer militairement.
Dans la même période, ils ont lancé une rumeur, dénuée de tout fondement, selon laquelle il y a des éléments de contre espionnage mauritanien qui se sont infiltrés (El-Moundessines) dans l'organisation du F.Polisario et dans les camps des réfugiés. Le travail donc de tous les autres (algero-marocains) consiste à démasquer ces infiltrés porteurs de virus mauritanien et d'informer les commissaires politiques afin de les éliminer.
Tout à coup, en 1977, on s'est rendu compte que des gens de notre entourage manquaient à l'appel. Et quand on demande de leurs nouvelles auprès de leurs responsables ou compagnons, les réponses étaient toujours vagues et évasives, du genre: "il est en mission secrète", "il est sur le front" ou carrément "je pensais qu'il était en congés dans les camps"! Bref, rien de précis, si bien qu'il y avait sans aucun doute anguille sous roche: c'est la grande purge, la "révolution culturelle" à la sahraouie.
Cette purge n'est ni une fiction ni un dénigrement encore moins de la fumisterie, mais une triste réalité bien cruelle que la grande majorité des sahraouis et sympathisants d'origine mauritanienne ont subi. J'ai été parmi ceux-là et j'ai vécu cette purge dans ma chair et mon sang.
Évidement, j'ai pardonné et à cet égard je n'ai aucune rancune, encore moins animé d'une quelconque mauvaise foi. Mais, par égard à moi-même, à ma famille et au devoir de la vérité, je pense qu'il est temps de partager cette vérité et ainsi rendre hommage aux victimes, aux disparus, tout en pointant du doigt les tortionnaires. D'ailleurs, le Secrétaire générale du F.Polisario a reconnu ces purges dans son discours devant le 8ème Congrès du mouvement tenu au mois de juillet 1992 (Md Fadel Ismaïl "Les sahraouis" Éd. l'Harmattan, p. 103). Donc, ce que je raconte là n'est qu'un secret de polichinelle.
Dans mon cas, je venais d'Alger pour assister aux festivités marquantes le deuxième anniversaire de la proclamation de la RASD le 27 février 1978. Vingt jours plus tard, alors que je me préparais au voyage de retour, le préposé chargé des billets m'informa qu'il a reçu des instructions de ne pas me donner de billet et de m'informer de s'adresser immédiatement au secrétariat général au bunker de Bechir à Rabouni.
Aussitôt arrivé, on m'a envoyé au goulag de Sidi Ahmed Albatal, où j'ai passé plusieurs mois à subir toute sorte de tortures, de mauvais traitement et de privation, lesquels je ne peux qualifier ici. Durant mon séjour dans ce goulag, j'en ait vu des sortes abjectes de tortures qu'il m'est difficile de décrire ici, tellement elles peuvent choquer les lecteurs.
Toutefois, deux (2) événements m'ont marqué durant cette période noire de ma vie que d'ailleurs je n'oublierai jamais. Le premier est arrivé, alors qu'on m'a obligé pendant des heures et des heures, des jours durant, de rester debout devant l'entrée principale du camps en portant sur ma tête un sac rempli de sable, pesant plus ou moins 30kg, une voiture s'est arrêtée à côté de moi et son conducteur, d'une voix moqueuse, me lança "tiens bon": c'était le Secrétaire Général du F.Polisario, Mohamed Abdelaziz que je connais bien, le même qui est toujours au poste!
Le deuxième événement, quant à lui, est arrivé quand mon père (Allah Yarhmou Wi ighamdou bijenatihi el naiimaa), UN GRAND CROYANT QUI NE FAISAIT SES PRIÈRES QUE DANS LA MOSQUÉ (Abdoun Saalihoun We Taghioun Lillah), est venu me rendre visite (je ne sais par quel moyen ou miracle) et m'a dit littéralement les paroles suivantes: «mon fils, il faut être patient (Essber). Dans la douleur on doit méditer et saisir encore plus la puissance de Dieu. Ce qui t'arrive aujourd'hui n'est qu'un événement passager et moi je te promets de t'ériger une échelle pour aller sur la lune si tu le veux. Mais dis-toi que ta douleur, profonde qu'elle puisse être, est moindre que la mienne car ces gens (le Polisario) ne nous permettent pas de faire la prière.
Ils nous privent d'accomplir notre devoir fondamental de musulmans vis-à-vis de Dieu??!!!! Que faire? Que faire? Ils n'iront jamais loin ... jamais loin.» El il s'est mis à pleurer de toute sa douleur. Voici un événement qui me fait encore mal aujourd'hui. À cet instant et à cette rencontre avec mon père, j'ai décidé de quitter le Polisario.
Pourtant, je n'étais pas le seul dans cette situation: ni le premier ni le dernier à avoir subi les foudres de Sidi Ahmed Albatal avec la bénédiction et les orientations de Bachir Mustapha Sayed. Il y avait beaucoup de morts et de disparus durant ces années de plomb. Certes, c'était la guerre, mais on la croyait contre l'ennemi pas contre nous. Plusieurs on pris la fuite pour mourir dans le désert, de soif, de fatigue, de manque de carburant et je ne sais de quel autre facteur douloureux...
Je me souviens toutefois de mes amis morts ou disparus: Deddah Ould Hamdi et Mohamed Salem Ould Haidalla. À cet égard, je ne peux que m'arrêter ici pour rendre hommage à son excellence le Président Mohamed Khouna Ould Haidalla pour sa position ferme, prise dans l'intérêt supérieure de la Mauritanie et son intégrité territoriale, sans jamais laisser la rancune ni la vengeance prendre le dessus sur son devoir de chef d'État.
Il faut le dire et le redire, si la Mauritanie est aujourd'hui un pays qui jouit de son intégrité territoriale et qui aspire à renforcer ses institutions et développer son économie, ce n'est pas grâce à Ely, à Sidi ou à Aziz, mais plutôt grâce à des officiers valeureux, chacun à son temps: Mustapha Ould Mohamed Salek et Mohamed Khouna Ould Haidalla.
Pour terminer, le constat est là. Plus de trente ans passés et le peuple sahraoui est toujours en exil. Ce peuple d'El-Bidhans est une réalité incontournable pour la Mauritanie, pour les pays du Maghreb et pour le Monde entier. Son droit à l'autodétermination est inaliénable, que le Maroc l'accepte ou non. La position passive actuelle des dirigeants bourgeois du F.Polisario est une insulte et une trahison à la mémoire des hommes et des femmes qui se sont sacrifiés pour la cause (à leur tête El Welly Mustapha Sayed, Allah yarhmou) et, du coup, une forme de complicité flagrante et impardonnable avec l'occupant: le Maroc.
Maître Takioullah Eidda,
avocat
Québec, Canada
-------------- Ce texte exprime l'opinion de l'auteur et n'engage pas les modérateurs du forum.
14 comentarios:
Merci Maître!
Vous êtes le seul intello bidhani libre qui connait bien ces gens et qui n'attend rien: ni de la Mauritanie ni du Front Polisario ni du Maroc.
De grâce, aidez-nous à découvrir la vérité.
Merci d'avance pour vos contributions équilibrées.
Mohamed Mahmoud
Señor Takiyoullah, creo que no eres la persona mas indicada para hablarnos de este tema, ya que tu fuiste uno de los primeros en desertar de nuestra filas, en principio a Libia, luego mas tarde sabe Dios a donde, lo que realmente no entiendo es el por que de este tema del tribalismo(en el cual desinformas a los lectores de esta pagina)y que ahora vienes a plantear en este supuesto articulo, Señor Taquilyoullah, has destorsionado varias realidades de nuestra causa, de nuestra lucha y de nuestros principios, no se como has tenido la osadia de hablar de nuestro heroe y fundador de nuestro movimiento de esta manera, el saharaui es el saharaui y el mauritano es el mauritano y por mucho que intentes vestir la mona de seda mona se queda.
Un consejo de una hermana es mejor que te dediques a lo que mas sabes, yo creo que me entiendes...
Merci Maître! Merci du fond du cœur ya Elbidhani El Mitaadal. Le peuple sahraoui est victime au premier degré de ses soi-disant dirigeants, qui au fond ne sont que des opportunistes sans scrupule.
Señora hayat,
Con tu amistad con sidahmed batal et bachir mustafa, no puedes ocultar lo que todo el mundo sabe...ES mejor de hablar del pasado : nepotismo,segregacion,harem...(creo que me entiendes) y la lista es larga.
Todo lo que dice el abogado takiyoullah es verdad.
Pero la pelota es una enfermedad dificil para extirpar
Señor Eliot Yan
Yo soy hija de un mártir, y me siento orgullosa de serlo, mi madre ha estado militando hasta el ultimo suspiro, lo de Sidahmed Batal y Bachir Mustapha , me suena a Majainzu, y creo que a ti te remuerde la conciencia, y estoy completamente segura que estas en la otra parte o sea al lado de déspota , criminal y saniguinario regiman de Marruecos.
Lo que abordo el señor Tquiyoullah, es un tema que esta muy machacado, la cuestión es el por que ahora en estos momentos?
Señor Elio, probablemente te dieron las indicaciones necesarias para incluir en estos comentarios el poco veneno que os queda a ti y a tus amos.
No defiendo a nadie, pero si a la causa que muchos hombres que dicen serlo la abandonaron, me importa un bledo bachir mustafa o sidahmed batal, lo que me importa es que no se insulte y se intente desinformar a los saharauis y mucho menos al fundador del F.POLISARIO.
Si quieres buscar fama no lo hagas con la sangre de los saharauis. ALLAh Chahid beynana wa beynakum.
Hayat Sauba
"Comme je l'ai déjà dit, le F.Polisario n'existait pas avant 1974" qu'est ce que c'est Ça????
Qu'elle mensenge!!!!
"Comme je l'ai déjà dit, le F.Polisario n'existait pas avant 1974" Qu'est ce que c'est que ça???? Quelle mensenge!!!!!!
La guerre contre l'espagne n'existait pas??? les manifestations...ect...l'ecrivain est perdu.
@Essahrawi
Oui, le Polisarion n'existait pas avant 1974!!!
Quant à la guerre contre l'Espagne, il n'y a eu qu'une SEULE OPÉRATION, celle que Mahfoud Ali Beiba (Allah Yarhmou) a exécuté en 1974 sur le postes de relais de PHOS-BOUCRAA. Tout le reste c'est de la fabulation: naissance de la RASD à Bir-Lehlou; la naissance de les dirigeants au Sahara Occidental ... etc!!
Dans les Kissinger cables de Wikileaks, en 1973 le Front Polisario existe déjà. Juste un cable parmi les nombreux pour exemple: SPANISH SAHARA: REPORTED GUERRILLA ACTIVITY
"Oui, le Polisario n'existait pas avant 1974!!!
Quant à la guerre contre l'Espagne, il n'y a eu qu'une SEULE OPÉRATION" Voila, tenez,vous le dites vous même. Ça prouve que le Polisario existait avant 1974.
Repectueusement, Essahrawi.
Muy estimado Takiullah uld Eidaa
Ante todo le dire que soy un admirador suyo por su gran valentia entonces cuando decidio liberarse para siempre de la represion de El Batal y Bachir Sayed y tambien por su puesto, por su tenacidad y esfuerzo con los cuales obtuvo su diploma de abogado.
Referente a sus articulos, acerto en el tema de la represion, pero desafortunadamente en los hechos historicos y fechas determinadas Usted cometio un grave error. Por favor como nos puede Usted decir que el Polisario no existio antes de 1974 ? Podra criticar todo lo que Usted quiere, pero borrar hechos historicos indiscutibles es un poco extraño. Al igual que es extraño que Baba Sayed no responde a sus escritos ya que convivio con Usted 10 años en Canada.
Saludos Cordiales
Beni Hassan
Señor Taquiyullah. al parecer tu larga ausencia de este movimiento al que has pertenecido en algún momento en tu vida, te ha causado una amenesia profunda, te recuerdo que nuestro movimiento fue creado el 10 de mayo del año 1973, y su lucha armada fue con la primera acción militar contra el colonialismo español el 20 de mayo del año 1973, el Janga.
mas tarde las incursiones fueron incrementándose a lo largo de todo el territorio nacional: Hausa, Echederia, Guelta etc.Es increíble que tu desertor del movimiento, antiguo chofer de la embajada de la RASD en Argelia, intentes amputar una de las mas importantes etapas de nuestra historia.
Este movimiento al que tanto debes, que consiguió cambiar la mentalidad de muchas familias respetadas, llegando a conseguir la igualdad entre blancos y negros, entre los artesanos y los que realmente han dado sus vidas, y que no temen a la muerte en el momento de empuñar las armas para defender la libertad y la diginidad de su pueblo, hombres que nunca se han escondido detrás de las culturas y tradiciones que no merece la pena mencionar por respeto a esta pagina.
Tu hermano Mahmud Eyda. merece el respeto que se ha ganado, hombre querido por todo el pueblo, que se ha ganado el cariño de todos los estudiantes, de todas las generaciones saharauis.
La libertad de expresión, tiene sus limites , tu has sobrepasado esos limites.
Hayat Sauba
salam alaikoum
creo que hay una parte de la verdad de lo que dijo el señor TAQUILLOALLAH y nadie puede negar lo que paso durante los primeros años de le revolución. creo que los dirigentes del FRENTE POLISARIO están en el punto muerto políticamente hablando.
y para describirles conviene lo que dijo el ex presidente francés "ceux qui commencent la revolution ont toujours du mal a la finir"
Cualquier saharaui no puede fiar de alguien que pretende escribir sobre el pasado de su movimiento para la independencia si lee: “Mokhtar Ould Daddah a créé le Polisario”, porque senciamente el Polisario no depende ni de El Wali ni de nadie y menos de Mokhtar Daddah, sino de todo un pueblo. Queria seguir leendo pero al llegar a este parrafo:“Jusqu'au début de 1974, El Welly Mustapha Sayed …était encore au Maroc”, he decidido no terminar el resto porque la verdad es que no vale la pena con tantas mentiras.
No terminar sin saludar a Hayat Sauba, símbolo de la mujer saharaui, valiente y orgullosa de sí misma.
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