Par
Baba M. Sayed
Il y a quelques mois, le roi du Maroc a promis au gouvernement mauritanien une visite royale, en bonne et due forme, à Nouakchott, pour, dit-on, permettre aux deux partenaires de signer des accords dans différents domaines et ainsi renforcer leurs relations bilatérales et leur donner une impulsion nouvelle.
Deux jours avant le déroulement de la visite promise et tant attendue du côté mauritanien, le roi se décommande à la grande surprise de ses futurs hôtes mauritaniens. Du coup ces derniers se perdent en conjectures sur les véritables raisons qui ont amené le roi à « se défiler » de la manière
Les différents prétextes avancés « officiellement » par la Maison royale pour justifier l’annulation du voyage royal, insécurité et menaces terroristes, agenda chargé du roi… etc., ne semblaient pas, loin s’en faut, pertinents et en plus ils n’ont convaincu personne.
Il aura fallu attendre quelques jours pour que les langues se délient enfin et que l’on découvre que le roi - qui comme, par ailleurs, tous ses prédécesseurs sait profiter de la faiblesse de la Mauritanie et n’hésite pas, chaque fois qu’il en a la possibilité, de l’humilier - a posé aux autorités mauritaniennes, dans les heures précédant de peu son désistement programmé, des conditions qui ressemblent fort bien à un ultimatum : si vous voulez que Nous venons chez vous, il faut mettre, et sans attendre, à la porte votre ministre des affaires étrangères et le remplacer par un autre qui soit moins favorable aux thèses de l’autre partie (entendez le Front Polisario) et plus disposé à l’égard du Royaume.
Prodigieusement embarrassées mais ne souhaitant pas mettre à mal leurs rapports avec la Monarchie marocaine en donnant l’impression au roi qu’elles rejettent son ultimatum, les autorités mauritaniennes ne trouvent rien de mieux que de faire jouer le temps en attendant le moment propice de ravaler leur fierté et de châtier le ministre coupable.
Bien que le roi ait annulé sa visite, l’État mauritanien ne désespère de le ramener à de meilleurs sentiments. Il décide de déployer tous les efforts et d’user de tous les artifices, y compris les plus indignes d’un État qui se veut souverain et indépendant, pour « calmer le jeu » et apaiser l’ire royale.
A cet effet, il dépêche au Maroc, dans les semaines qui ont suivi l’annulation de la visite royale, un haut gradé de l’armée mauritanienne, connu pour ses accointances avec le Makhzen, porteur d’un message urgent et dit-on d’une importance capitale et dont le contenu peut se résumer ainsi : La Mauritanie qui tient par-dessus tout à ses relations privilégiées avec le Maroc, veut donner toutes les assurances à sa Majesté qu’elle se fera un plaisir et un devoir de se débarrasser, à la première occasion, du ministre fautif. L’État mauritanien est fermement décidé à faire tout ce qui est en son pouvoir pour convaincre le roi et son gouvernement sa permanente et constante disponibilité à lever tout obstacle qui pourrait se dresser, dans le présent ou à l’avenir, devant l’existence de relations profondes et apaisées avec le Royaume chérifien.
Les officiels marocains qui ont une longue tradition dans la manière de profiter de la faiblesse de leurs « frères » voisins, prennent bonne note du message sans pour autant donner le moindre espoir au messager mauritanien quant à la possibilité d’une programmation d’une nouvelle visite de la part du roi dans son pays
Qu’à cela ne tienne !
Le président mauritanien procède quand même à un remaniement ministériel qui lui permet de se débarrasser, comme promis aux autorités marocaines, du ministre des affaires étrangères coupable d’entretenir des rapports suivis et amicaux avec les Sahraouis.
Le plus étrange est que le Palais n’a pas eu la réaction positive que l’on attendait avec impatience à Nouakchott. La Mauritanie qui s’attendait à être récompensée pour sa « vassalité » n’a récolté qu’un souverain mépris de la part du Palais royal. Mais qu’importe. A Nouakchott on est décidé à tout faire pour faire débarquer à Nouakchott ould Moualay Al-Hassan !!
Alors cette fois, au lieu d’un haut gradé de l’armée, le gouvernement mauritanien pour « décider » le roi, envoie une délégation des élus de la nation conduite par le président du Parlement.
N’ayant plus d’ennemi dans le gouvernement dont elles peuvent réclamer la tête, les autorités marocaines somment leurs hôtes de dire qu’ils apprécient l’initiative marocaine d’autonomie interne pour le Sahara Occidentale et qu’ils la considèrent, à l’exclusion de toute autre, comme pouvant favoriser ; la solution de la question sahraouie. Ce que ces derniers, ou du moins leur président n’hésite pas à faire. Et c’est là la ruse de trop
Avec les déclarations intempestives du président du Parlement mauritanien sur la supposée autonomie du Sahara Occidental, les Sahraouis se sont sentis, une nouvelle fois, trahis par les autorités opportunistes mauritaniennes.
Et pour recréer, à l’avenir, les conditions d’une réelle confiance entre les deux peuples et les deux États, il faut décidément de nouvelles générations au pouvoir en Mauritanie qui sachent apprécier à leur juste valeur les énormes et importants sacrifices consentis au quotidien, et ce depuis plus de trois décennies, pour permettre au peuple mauritanien de connaître la paix sur ses frontières nord et à ses gouvernements successifs de jouir d’une réelle stabilité.
09.06.08
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La ruse de trop