30.12.21

L'Algérie: une ligne infernale infranchissable

par Brahim Zoubeyr

En l'absence d'une réaction officielle de la Direction du Front Polisario aux propos calomnieux, insultants du Ministre des territoires occupés et de la diaspora sahraoui Mustapha Ould Sid Elbechir contre l'unique et seul allié du peuple sahraoui dans la région-la grande Algérie et son vaillant peuple-je ne peux m'empêcher de donner mon point de vue sur cette situation gravissime qui ne cesse d'incendier les réseaux sociaux.

Je ne veux pas polémiquer et encore moins faire un réquisitoire pour l'homme à qui je voue un grand respect, et loin s'en faut, je ne doute pas de ses convictions nationalistes mais pour dire simplement "quand on lance une pierre, on ne peut pas prévoir la mesure des dégâts qu'elle peut causer" comme dit le dicton sahraoui.
Revenons aux faits.

Paris,19 décembre 2021. Dans une salle archi comble de la municipalité Les Mureaux et devant un parterre de l'émigration sahraouie en France, le Ministre, au lieu de motiver les participants, les informer sur les derniers développements de la situation suite au retour à la guerre consécutivement à la violation par le Maroc du cessez-le-feu, s'en prend d'entrée à l'Algérie. Il ne mâche pas ses mots. Commentant la victoire de l'équipe algérienne de football, le Ministre dit in extenso "que l'Algérie perde, sa victoire ne nous intéresse pas." Notre Ministre ignore-t-il que tous les peuples arabes y compris le peuple marocain sont sortis dans toutes les capitales arabes et en Europe pour fêter, exprimer leur joie pour cette grande victoire de l'Algérie. Quelle honte ! Quelle démission de quiconque sahraoui et de surcroît un haut responsable de nier à l'Algérie ce que ses ennemis lui reconnaissent comme acquis grandiose dans le giron des grandes nations !

Et en toute honte bue, notre Ministre dit plus loin "je hais l'Algérie et la première fois d'y arriver, je tremblais de peur et si ce n'était notre revendication de l'indépendance, je ne mettrai jamais les pieds ni moi ni mes proches en Algérie". Un de ses proches collaborateurs lui souffle à l'oreille "les sandales portent l'humidité" un adage sahraoui qui veut dire les murs ont des oreilles. Il lui répondit sans vergogne "je dis ce que je pense sans hypocrisie. Je suis sincère et j'exprime mes convictions sans avoir peur de qui que ce soit". Il enchaîna non sans zèle "mon père et mon grand père n'ont connu que le Maroc où ils ont étudié, pas l'Algérie" sic ! Un lapsus de notre "sincère et courageux" Ministre ou une contre vérité à dessein inavoué ? La famille du Ministre Ehl Sidelbechir, une des familles des plus respectées et respectables de la société sahraouie n'a jamais dépassé depuis le 19°siècle les confins de Mheriz, actuellement territoire libéré et faisait partie de l'ensemble mauritanien à l'époque coloniale française avant d'être retrocédé à l'Espagne au milieu du 20°siècle. N'est ce pas on dit dans notre jargon littéraire "le chameau se lève et laisse derrière lui les excréments"?

Notre "courageux et sincère" Ministre peut il ignorer le largage par l'aviation marocaine des bombes au napalm et au phosphore blanc contre les populations sahraouies sans défense qui n'ont trouvé de refuge qu'en Algérie qui leur a ouvert chaleureusement son cœur, ses bras et ses frontières. On n'a pas à énumérer les bienfaits innombrables de l'Algérie en faveur du peuple sahraoui mais un fait hautement stratégique me tient à cœur et je ne peux le passer sous silence: je me souviens qu'on s'est installé en Algérie en 1975 avec une population à 99% d'analphabètes et aujourd'hui grâce à cette même Algérie, on est à moins de 1% d'analphabètes. Et si ce n'était cet accompagnement constant et désintéressé de l'Algérie, peut être tout le peuple sahraoui serait déjà anéanti durant les années de braise de Hassan II. Malédiction à celui qui ne sait pas rendre le bien.

Après ses attaques récurrentes contre l'Algérie que rien au monde ne justifie et surtout les sahraouis pour qui l'Algérie reste au delà d'une ligne rouge, une ligne infernale infranchissable, notre Ministre atteint de logorrhée s'en prend à son propre peuple et à sa direction politique dont il fait hélas partie. Avec toute l'outrecuidance, il mystifie tout. Pour lui il n'y a pas de gouvernement, pas d'institutions, pas d'Etat, tout simplement des réfugiés casés dans la région de Tindouf vivant de l'aide humanitaire internationale. Lui-même a affirmé qu'il n'est pas Ministre mais un simple réfugié de la Daïra de Mahbes, tout comme le Président, autre simple réfugié et dont les responsabilités politiques ne sont pas reconnues par le HCR.

Encore une fois faut-il rappeler à notre "courageux et sincère" Ministre que toutes les organisations internationales, entre autres le HCR, coordonnent bel et bien toutes leurs actions avec les autorités sahraouies à tous les niveaux et non directement avec les réfugiés comme il le prétend.

Mais ce qui est très grave dans les déclarations diffamatoires, calomnieuses et dénigrantes du Ministre c'est qu'il n'a non seulement mis en cause la légitimité de l'Etat sahraoui mais qu'il n'a à aucun moment évoqué le mot Front Polisario l'âme du peuple sahraoui, le mouvement de libération nationale qui dirige sa lutte, le mouvement qui a fait de lui Ministre plusieurs fois et membre de sa direction politique.

Plusieurs internautes s'interrogent sur les motifs réels qui ont poussé le Ministre à se déchaîner, à tort, contre l'Algérie et à renier tous les acquis réalisés par la sueur, les larmes et le sang du peuple sahraoui sous la direction du Front Polisario durant un demi siècle comme si rien était, banalisant tout comme question de simples réfugiés à l'image des réfugiés afghans, syriens ou somaliens.

Certains lui attribuent l'indigence intellectuelle de ne pas pouvoir différencier entre le moment et le lieu pour faire passer son message et que contrairement à tous les Ministres qui l'ont précédé, il veut faire preuve de courage et de sincérité et dire tout haut ce que d'autres pensent tout bas.

Le quid du Ministre. Pour ceux qui ne connaissent pas le Ministre, il y a lieu de rappeler qu'il a gravi les sommités du pouvoir tel un éclair, de simple infirmier à la 1°Région militaire jusqu'à deux fois Ministre et chef de la 4°Région militaire. Mais ce sont surtout les événements de 1988 qui sont à l'origine de la propulsion de notre Ministre aux hauts postes de commandement, pour dit-on pallier au vide laissé par les transfuges au Maroc, Omar Admi et Ayyoub Aouba. Là où il passe il ne fait que semer zizanie et tribalisme.

A la 4°Région militaire qu'il commandait, il a institué comme mode de communication la parenté tribale. Les combattants le surnommaient le dealer de la drogue à travers le mur marocain et ont fini par désobéir à ses ordres. Parachuté comme Ministre de l'intérieur, il a fait plus de gaffes qu'il n'a résolu de problèmes. Il a emprisonné à tort plusieurs jeunes sahraouis et se vantait de donner la face à tout le monde. D'ailleurs c'est l'emprisonnement arbitraire de ces jeunes qui les a poussés à se rapprocher de l'ennemi marocain et à se venger de notre Président alors qu'il se soignait en Espagne du Covid.

A cette période, ses caisses de résonance lui font accroire qu'en cas de décès du Président, il serait le nouveau élu. On lui fait monter des ailes plus grosses que sa taille. Aussitôt désigné Ministre des territoires occupés et de la diaspora sahraoui, il s'envola à Paris et fit exploser dans sa première réunion la bombe de la haine et du mépris contre l'Algérie qui ne mérite du peuple sahraoui que reconnaissance, gratitude et considération. A Paris, il s'est fait deplumer lui-même: sans ailes, sans plumes, sans duvet…

Pour conclure ce commentaire, en tant que sahraoui vivant en France, j'invoque la direction du Front Polisario à corriger cette anomalie de l'histoire dans les relations algéro-sahraouies. En tout cas la diaspora sahraouie en Europe est profondément choquée par ces déclarations condamnables d'un haut responsable sahraoui et ce n'est pas par les élucubrations du Ministère des territoires occupés qui, par son communiqué bidon, cherche à blanchir le Ministre et à faire endosser la responsabilité à l'ennemi marocain alors que des dizaines de témoins oculaires sahraouis étaient présents à cette abominable scène.

Le moins qu'on puisse envisager pour couper court à ces campagnes tendancieuses alimentées par l'ennemi c'est d'exaucer le désir du Ministre en le mettant dans la place qui lui sied, comme simple réfugié de Mahbes et convoquer en urgence une réunion extraordinaire du Secrétariat National pour geler son adhésion à cette structure.

Si la direction nationale du Front Polisario ne prend pas des mesures coercitives à l'endroit des hauts responsables et mettre l'homme qu'il faut à la place qu'il faut, l'ennemi s'en tirera à moins de frais et nous continuerons à ruminer des slogans vides et creux.

Brahim Zoubeyr
30.12.21
brahim69zoubeyr@gmail.com

------------- Ce texte exprime l'opinion de l'auteur et n'engage pas les modérateurs du forum.


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